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11 juil. 2025|6 MIN.
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Raisons potentielles de l'absence de Xi Jinping au sommet des BRICS

Photo: Getty Images

Malgré des liens diplomatiques et économiques solides entre la Chine et le Brésil, un ensemble de facteurs pourrait avoir conduit Xi Jinping à ne pas se rendre au sommet des BRICS au Brésil.

Voici une analyse de ces facteurs, classés du plus déterminant au moins influent, qui ensemble ont peut-être motivé cette décision.

1. La réticence de Pékin à partager le leadership au sein des BRICS, et la volonté délibérée d’en abaisser le niveau dans les pays jugés « non alignés »

Depuis la création des BRICS, un certain leadership informel s’est installé entre Pékin et Moscou. Cependant, l’invasion à grande échelle de l’Ukraine, les sanctions sévères, et l’épuisement progressif de la Russie ont placé cette dernière dans une situation de forte dépendance vis-à-vis de la Chine. Le partenariat initial s’est transformé en relation de subordination, donnant aux BRICS une coloration de plus en plus chinoise.

En apparence, le Kremlin conserve un rôle de leader, mais il reste largement tributaire de Pékin.
En revanche, des pays comme l’Inde ou le Brésil prennent parfois des initiatives indépendantes au sein des BRICS, ce qui ne cadre pas avec la vision chinoise d’une organisation servant ses intérêts.
Ce refus de renforcer la position des autres membres peut expliquer certaines absences de Xi Jinping, comme celle au sommet du G20 en Inde en 2023 — officiellement en raison de différends politiques, mais aussi pour ne pas rehausser le prestige international de New Delhi en y envoyant une délégation de haut niveau.

2. La réaction chinoise au veto brésilien sur l’élargissement des BRICS lors du sommet de Kazan en 2024

Le Brésil a bloqué l’adhésion du Nicaragua et du Venezuela aux BRICS, invoquant officiellement des tensions politiques avec leurs gouvernements.

Mais en réalité, cette opposition traduisait le refus de Brasília de permettre à la Chine et à la Russie de renforcer leur position au sein des BRICS en y intégrant deux pays sud-américains.
Dans sa stratégie de s’imposer comme le leader régional en Amérique du Sud, le Brésil considère qu’il doit en représenter les intérêts exclusifs au sein des BRICS.

Ainsi, pour le gouvernement de Lula da Silva, tout nouveau membre sud-américain devrait être politiquement aligné avec le Brésil. Or, ce n’est pas le cas du Nicaragua ni du Venezuela, avec lesquels les relations sont tendues.
Ces deux pays sont plus proches de Moscou et de Pékin, et leur adhésion aurait donc servi les intérêts chinois, mais pas ceux du Brésil. Cette divergence pourrait avoir incité Pékin à limiter sa représentation au sommet au Brésil.

3. Divergences commerciales et politiques actuelles entre le Brésil et la Chine

En 2025, plusieurs tensions ont émergé entre Pékin et Brasília, tant sur le plan commercial que politique :

  • Conflits autour du dumping : Depuis début 2024, le gouvernement brésilien subit des pressions de la part de l’industrie nationale au sujet des pratiques de dumping de la Chine. En réponse, il prévoit d’augmenter en fin d’année les droits de douane sur les voitures électriques importées, passant de 10 % à 35 %, une mesure qui viserait principalement les constructeurs chinois.

  • Affaire BYD au Brésil : Entre mars et mai 2025, les procureurs brésiliens ont mené une série de contrôles et de perquisitions sur les chantiers des usines BYD (constructeur chinois) dans le pays. Ils y ont relevé des infractions au droit du travail, des cas de fraude fiscale, et même des indices de travail forcé et potentiellement de traite humaine.
    Outre le risque immédiat d’une amende de 50 millions de dollars, cette affaire pourrait durablement ternir l’image de la marque en cas de confirmation des faits.


    Pour mémoire, les États-Unis et l’Union européenne ont imposé des restrictions au Turkménistan, en cessant l’importation de coton et de produits textiles turkmènes, pour des raisons similaires.
    Un scandale comparable au Brésil, s’il venait à s’amplifier et gagner en visibilité, pourrait compromettre les ventes de voitures électriques chinoises, déjà visées ailleurs pour dumping. Ce type de controverse pourrait offrir un prétexte à d’autres pays pour imposer des restrictions au secteur automobile chinois.
    Dans ce contexte, Pékin serait pressé d’étouffer l’affaire, et pourrait attendre du gouvernement Lula qu’il exerce une forme de pression administrative pour calmer les choses.

  • Incident diplomatique lors d’un voyage officiel : Lors d’une visite à Pékin en 2025, la Première dame du Brésil, Janja da Silva, a publiquement mis en garde contre la dangerosité de TikTok et évoqué la mort d’enfants liée à son utilisation. Bien que cela n’ait pas déclenché de crise diplomatique, cet écart de protocole aurait été mal perçu par les élites chinoises et aurait tendu l’ambiance entre les délégations.

L’ensemble de ces désaccords récents a pu encourager Xi Jinping à exprimer son mécontentement de manière symbolique, en choisissant de ne pas se rendre personnellement au sommet.

4. L’absence de Poutine au sommet

Le Brésil n’a pas souhaité garantir la sécurité de Vladimir Poutine en cas de venue, une décision qui, dans le contexte géopolitique actuel de forte polarisation, pourrait être interprétée par Pékin comme une volonté de Brasília de ménager plusieurs camps à la fois.
Par ailleurs, la Chine utilise aujourd’hui les apparitions publiques de Xi Jinping aux côtés de Poutine comme un moyen indirect de faire passer plusieurs messages :

  • à la Russie, pour lui rappeler qu’elle se trouve désormais dans la sphère d’influence chinoise, et qu’un rapprochement trop rapide avec les États-Unis serait malvenu ;

  • à Washington, pour souligner que Pékin conserve une influence concrète sur le Kremlin, ce qui joue un rôle dans le grand jeu d’équilibrage des puissances.

Ainsi, l’absence de Poutine, conjuguée à toutes les autres tensions évoquées précédemment, a sans doute pesé dans la décision de Xi Jinping de ne pas participer au sommet au Brésil.

5. Divergences autour du plan de paix concernant l’Ukraine

C’est sans doute la raison la moins probable, mais selon certaines sources officieuses, Pékin aurait espéré un engagement plus actif du Brésil dans la promotion du plan de paix sino-brésilien.
Alors que la Chine avait désigné un émissaire spécial, qui a effectué plusieurs tournées en Asie et en Europe pour défendre cette initiative, le gouvernement de Lula da Silva n’a pas nommé de représentant personnel du président pour mener un travail similaire en parallèle.

Ce manque de coordination a contribué à l’essoufflement du plan conjoint, et au transfert de l’initiative vers les États-Unis, notamment depuis l’élection de Donald Trump.

Pékin considérait la médiation sur la question ukrainienne comme un levier stratégique permettant de maintenir un dialogue régulier avec d’autres puissances, en particulier européennes, tout en renforçant son propre poids géopolitique.
L’affaiblissement de cette dynamique — que Pékin pourrait imputer au Brésil — aurait pu être un facteur supplémentaire dans la décision chinoise de minimiser l’importance du sommet organisé à Brasília.

6. Rumeurs sur des difficultés internes de Xi Jinping

Certaines rumeurs non confirmées évoquent des tensions internes croissantes au sein de l’appareil d’État chinois, voire un contrôle affaibli de Xi Jinping sur les élites du régime.

Cela pourrait, selon certaines théories, expliquer sa volonté de rester en Chine pour mieux maîtriser la situation.
Toutefois, ces hypothèses restent très spéculatives et ne doivent pas être prises comme des éléments d’analyse solides.

Conclusion

Il est probable qu’un ensemble de facteurs — diplomatiques, économiques, stratégiques et symboliques — ait conduit Xi Jinping à renoncer à sa participation au sommet des BRICS au Brésil.

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