Les pièces sont en place : c'est de Münich que tout a commencé, c'est de Münich que tout doit se terminer. La question n'est que de savoir comment et dans quelle direction.
Michaela Stache (AFP)
Lors de la Conférence de Munich en 2007, le criminel de guerre Poutine a prononcé la suite de son discours de 2005, dans lequel il dénonçait le monde injuste et déclarait l'effondrement de l'Union soviétique comme la « plus grande tragédie géopolitique » du siècle dernier. Évidemment, cette déclaration reflétait non seulement la vision personnelle de Poutine, mais aussi ses objectifs futurs. De ce discours, que le monde occidental n'a pas perçu comme une menace, a commencé le mouvement de Poutine vers « la restauration de l'Union soviétique ».
Le 15 février 2025, la Conférence de sécurité de Munich commencera une nouvelle session de discussions. Mais le plus important ne sera pas les discussions, mais les décisions cruciales qui, aujourd'hui, peuvent ou non être prises.
En fonction de ce qui sera décidé, cela déterminera non seulement le futur de l'Ukraine, mais aussi celui de l'Europe et des États-Unis. Cela déterminera également quelles parallèles l’histoire future tracera : vers la conférence de Téhéran de 1943 ou celle de Yalta de 1945.
La partie a commencé... Les pièces ont fait leurs premiers pas.
Il existe deux « zones » où se déroulent des combats préparatoires non publics:
La première zone concerne la tentative d'imposer un embargo total (blocage) de la flotte fantôme de la Moscovie en mer Baltique. Cette idée est soutenue par les pays scandinaves et baltes. Une partie de cette idée a probablement été délibérément rendue publique à travers un article de Politico, dans le but d'entraver sa mise en œuvre.
L'idée que proposent les pays du bassin baltique est simple : bloquer la flotte fantôme (les pétroliers) en mer Baltique. Cela permettrait de couper immédiatement une partie importante des exportations de pétrole, qui soutiennent l'économie militaire de la Moscovie.
Cependant, pour que cette initiative aboutisse, deux éléments sont nécessaires : une majorité de pays soutenant cette idée et une décision collégiale de l'UE.
Si une majorité de pays est favorable, il sera possible de faire pression collectivement sur la Hongrie, qui bloquerait sinon toute sanction contre la Moscovie.
Le Danemark, la Suède et la Finlande ont déjà pris des mesures : déclarations publiques, coupures d'approvisionnement en électricité, négociations, et mise en lumière des actions que Moscou a entreprises dans le cadre de la guerre hybride contre les pays baltes (rupture de câbles, violations de l’espace aérien, etc.). L’objectif est de montrer que Moscou mène déjà une guerre contre les pays de l'OTAN. Bien qu'il ne s'agisse pas d'une confrontation directe, c’est bel et bien une guerre hybride.
De son côté, Moscou a lancé sa propre campagne d'information. Elle cherche à désescalader la situation en mer Baltique, niant toute implication, insistant sur le caractère accidentel des événements et manipulant les titres sur les « ruptures » (en réalité réparations) des câbles de Rostelecom.
L'objectif de cette campagne d'information est de faire croire qu'il n'y a pas eu de « sabotage », que Moscou ne mène pas de guerre hybride et que tout cela découle de la « russophobie » des pays scandinaves et baltes. Moscou promeut également cette manipulation dans les médias occidentaux, où un incident accidentel de rupture de câbles près de la Norvège est mis en relation avec quatre autres incidents de sabotage.
Le but final est d'affaiblir les arguments des pays baltes et scandinaves devant les autres membres de l'UE. Il s'agit de semer le doute sur l’idée que les « sanctions sévères contre la flotte fantôme de pétroliers de la Moscovie en mer Baltique » seraient une réponse appropriée aux provocations de Moscou. L'objectif est de créer une situation où « tout n'est pas aussi clair ». En remettant en question des cas évidents de sabotage, Moscou tente de priver ces pays d'arguments solides.
La deuxième zone — il s'agit de la poursuite du soutien militaire des États-Unis.
La première étape a été franchie par l'Ukraine, lorsqu'elle a proposé l'année dernière, par l'intermédiaire de Lindsey Graham, à Trump une proposition liée à des « ressources précieuses pour les États-Unis ». Et il semble que ce soit le seul mécanisme efficace qui permette, d’une part, à Trump de sauver la face, puisqu'il pourra présenter son changement d’avis et ses promesses à ses électeurs comme un accord avantageux : les États-Unis obtiendront des fonds et des ressources, et d'autre part, l'Ukraine pourra obtenir des décisions cruciales pour continuer l'épuisement de Moscou et renforcer sa position dans les négociations.
C'est sur ce terrain que la première bataille a eu lieu.
Tucker Carlson, sans raison apparente (ou du moins sans explication), a promu un récit pro-moscovite, affirmant que la moitié de l’aide américaine avait soi-disant été vendue par l'Ukraine aux cartels de la drogue mexicains. Cette manipulation est évidente, Carlson ayant lié l’Ukraine au problème médiatique majeur des États-Unis : les migrants et les cartels. Mais pourquoi maintenant ? La réponse est apparue quelques heures plus tard, révélant l’initiative que Carlson essayait de détruire.
Il a été révélé que le républicain Joe Wilson a déposé un projet de loi au Congrès. Ce projet vise à « donner à Trump le droit de transférer à l’Ukraine des armes gagnantes sous forme de prêt ou de prêt-bail ».
L’objectif de cette loi est de protéger Trump contre les conséquences éventuelles si les armes fournies réduisaient la capacité de défense des États-Unis ou nécessitaient de contourner les lois sur la protection des technologies sensibles.
Bien entendu, sans un ordre direct de la Maison Blanche, le président de la Chambre des représentants, Johnson, ne mettra pas cette question en discussion. Et la question de savoir si cet ordre arrivera sera décidée lors des réunions de cette semaine.
Ainsi, Carlson, en tant que lobbyiste pro-Moscou, amateur des supermarchés russes et représentant de l’aile pro-Kremlin à la Maison Blanche, a simplement cherché à entraver ce processus et à neutraliser Wilson.
Il est important de comprendre la situation:
Trump n’a pas de stratégie cohérente sur les principales questions stratégiques. Sa politique est un ensemble de décisions chaotiques et opportunistes qui reposent sur la vision du président à un moment donné. Et cette vision est façonnée par son entourage, composé de groupes d’influence divers : de ceux prêts à soutenir l'Europe et l’Ukraine, à ceux qui prônent une réinitialisation des relations avec Moscou en légalisant les annexions.
Pendant ce temps, la prochaine bataille commencera dès aujourd'hui avec la rencontre le vice-président Pence et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen.
D'ici le 15 février, plusieurs événements intéressants auront lieu, et nous en parlerons au fur et à mesure qu'ils se produiront.
La bataille pour l'avenir de l'Europe continue…
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